Rapport final

Présentation du sujet

Le cyber harcèlement est un phénomène qui s’accroit de jour en jour et qui existe dans le monde entier, notamment depuis l’arrivée des nouveaux modes de communication. En effet, l’expansion des nouvelles technologies a fait apparaître des aspects positifs comme l’accès à l’information ou un moyen de communication plus rapide, mais également des aspects négatifs comme de nouvelles formes de relations entre individus, les nouveaux modes de communication peuvent être un support d’expression de la violence et du harcèlement entre individus. C’est un phénomène qui mérite d’être étudié de manière plus approfondie afin de mieux connaître les causes et les conséquences de ces violences en ligne.


Dans la continuité des travaux d’Olweus sur le harcèlement, Smith a été le premier à s’intéresser à ce phénomène de cyber harcèlement. Pour lui, le cyber harcèlement serait « un acte agressif, intentionnel perpétré par un individu ou un groupe d’individus au moyen de formes de communication électroniques, de façon répétée à l’encontre d’une victime qui ne peut facilement se défendre seule ». Cet acte peut prendre différentes formes comme la diffusion de fausses informations, l’usurpation d’identité, les rumeurs…


Nous avons établis différentes dimensions et sous dimensions nécessaires à la description de notre objet d’étude comme notamment les variables « lourdes » (l’âge et le sexe), la nature et le contenu du cyber harcèlement (type de cyber harcèlement, privé ou public), la cause du cyber harcèlement (raisons du cyber harcèlement), les moyens utilisés par le cyber harceleur (plateforme, réseau social en particulier), fréquence du cyber harcèlement (fréquence, période), connaissance ou non du cyber harceleur (âge, sexe de celui-ci), les répercussions dans la vraie vie (harcèlement également ou non dans la vraie vie, conséquences psychologiques plus ou moins graves). Ensuite, nous avons établis différentes hypothèses à partir de références à la littérature sociologique et nous en avons tiré des dimensions et sous dimensions nécessaires à la validation ou non de ces hypothèses. Voici nos trois hypothèses :


Notre première hypothèse est que l’école joue un rôle dans le cyber harcèlement. D’après les recherches de Hinduja et Patchin en 2010, il y’aurait un lien entre harcèlement à l’école et cyber harcèlement. Les comportements que les cyber harceleurs adoptent sur internet, positifs ou négatifs sont généralement les mêmes que ceux qu’ils adoptent à l’école. Afin de valider ou d’invalider cette hypothèse, nous demanderons aux enquêtés où s’est produit leur harcèlement dans la vraie vie, s’il a eu lieu. Notre seconde hypothèse est que les jeunes, en l’absence de surveillance des activités faites en ligne, ont plus de risque de se faire cyber harceler, selon les travaux de Smahel et Wright en 2014. D’après les travaux de Livingstone en 2016, si l’accompagnement des parents est de contraindre ou d’interdire leurs enfants à aller sur internet, cet accompagnement ne sera pas efficace et ne permettra pas de prévenir les risques de cyber harcèlement. Selon Hinduja et Patchin (2012), le cyber harcèlement est moindre lorsque les enseignants proposent des activités pour un usage sécurisé d’internet. Pour valider ou invalider cette hypothèse, nous demanderons si leurs parents surveillaient ce qu’ils faisaient sur internet, ainsi que sur combien de réseaux sociaux sont-ils inscrits et s’ils sont sécurisés. Selon Statista, en 2019, les jeunes de 18 à 30 ans se faisait le plus harcelé sur Facebook à 81%, par rapport aux autres réseaux sociaux. Notre troisième hypothèse est que le fait d’être isolé socialement, voir rejeté est lié au cyber harcèlement selon Kowalski (2014). De plus, les travaux menés par Fletcher sur les facteurs psychologiques dû au cyber harcèlement montre que celui-ci est lié à une faible estime de soi, une mauvaise perception de la vie et de l’expérience scolaire. Pour valider ou invalider cette hypothèse, nous avons croisé plusieurs dimensions : le nombre d’ami au collège, au lycée, et en étude supérieur pour pouvoir le mettre en lien avec l’âge de cette personne au moment du cyber harcèlement et ainsi prouver ou non que le fait d’être isolé socialement mène plus souvent au cyber harcèlement. Puisqu’à notre sens, n’avoir que quelques amis ne signifient pas forcément d’être isolé, nous ajouterons la question du soutien durant le cyber harcèlement, afin de savoir si la victime en a parlé à sa famille ou ses amis, ce qui prouvera d’avantage si la victime était plutôt isolée socialement ou non.


Pour rappel le lien de notre questionnaire ci-dessous

Questionnaire


Présentation de l'échantillon


Nous avons mené une enquête par questionnaire et nous avons récolté 224 réponses au total.
Notre enquête étant un exercice d’analyse de données, nous avons conscience que les résultats de
notre échantillon ne sont pas forcément représentatif.

Parmi les répondants, la majeure partie d’entre eux étaient âgés de 19 à 25 ans, soit 42,41% de nos enquêtés. 15,18% d’entre eux avaient entre 12 et 15 ans, 21,88% avaient entre 16 et 18 ans et 20,54% avaient plus de 25 ans.


Nous remarquons une prédominance féminine dans les réponses à notre enquête. En effet, les répondants sont 64,57% de femmes contre 27,80% d’hommes. De plus, 7,62% d’entre eux ne se considèrent pas comme appartenant à l’un des deux sexes précédents.


Eléments de descriptions de notre objet d'étude


Dimension 1 : contenu du cyber harcèlement


Tous les contenus que nous avons donnés en modalité ont été vécu au moins une fois par un de nos répondants. Néanmoins, nous remarquons tout de même que les types de cyber harcèlement principaux sont les moqueries et les insultes.


Dimension 2 : type d'harcèlement


Le harcèlement est plutôt privé que public : c’est-à-dire qu’il se produit, pour 57% de nos enquêtés, sur une plateforme où seul le cyber harceleur et le cyber harcelé ont accès. Tandis que pour 43% de nos enquêtés, le cyber harcèlement se fait en public, soit un endroit où tout le monde y a accès.


Dimension 3 : cause du harcèlement


Nous avons questionné les cyber harcelés sur la principale cause de leur cyber harcèlement, la seconde et la troisième, s’ils en ont connaissance. La principale cause de cyber harcèlement est lier à autre chose que toutes les raisons que nous avons citées mais aussi beaucoup lier à l’apparence physique. On remarque tout de même que 17,2% des enquêtés ne connaissent pas la cause de leur cyber harcèlement. En seconde et troisième cause de cyber harcèlement, les réponses sont diverses mais moindres : apparence physique, situation sociale, autre…


Dimension 4 : moyens utilisés par le cyber harceleur


Plus de la moitié de nos enquêtés se sont fait cyber harcelées principalement via les réseaux sociaux, soit 62,6%, tandis qu’ils sont 15,2% à s’être fait cyber harcelés via texto. S’il a eu lieu, la seconde fois qu’ils se sont fait harceler reste également via les réseaux sociaux, soit 36%, mais également par appel téléphone, soit 22,5%. Le troisième moyen de cyber harcèlement, s’ils en ont vécu un, était majoritairement par texto, soit 40,4% des personnes indiquant avoir vécus plusieurs cyber harcèlements.

Le cyber harcèlement se passe sur tous les réseaux sociaux puisque aujourd’hui, tous les réseaux sociaux permettent de laisser des messages, privés ou publics. Pour la majeure partie de nos enquêtés pour lesquelles leur cyber harcèlement a eu lieu sur un réseau social, il s’est effectué sur Facebook, suivi d’Instagram et de Snapchat. Certains évoquent d’autres réseaux sociaux que ceux cités.


Dimension 5 : fréquence du cyber harcèlement


Nous avons réalisé notre enquête en faisant en sorte d’avoir uniquement les réponses de personnes s’étant déjà fait cyber harcelé. Pour cela, les personnes répondant « non » ne pouvaient pas donner suite au questionnaire. On remarque, ici, que la plupart des cyber harcelés ne l’ont été qu’une seule fois, suivi de très près par les individus s’étant fait cyber harceler plusieurs fois dans leur vie. Ils sont largement moins nombreux à être cyber harcelés très souvent, mais cela reste tout de même fort pour de telles situations.


Afin de tenter d’identifier à quelle période le cyber harcèlement a-t-il le plus lieu, nous avons interrogé nos enquêtés sur quelle période ils se sont fait harceler. Sans surprise, dans la plus grande partie des cas, à 72,1%, le cyber harcèlement a lieu durant le collège. Ensuite, 34,5% des enquêtés ont vécu le cyber harcèlement au lycée. Tandis que le cyber harcèlement durant l’école primaire, les études supérieures ou encore durant la vie professionnelle sont moindres.


Dimension 6 : connaissance ou non du cyber harceleur



À travers ces questions, nous voulions en connaître davantage sur les identités des cyber harceleurs, dans le cas où ils les connaissent. D’ailleurs ils sont 53,5% à connaître leur cyber harceleur, 14,7% à avoir un soupçon de qui se cache derrière leur cyber harcèlement et sont 31,8% à ne pas savoir qui il est. Dans le cas où ils connaissaient le coupable, il avait généralement le même âge que la personne harcelée (36,2%) ou était un peu plus âgée (18,4%). De plus, les victimes sont plus souvent cyber harcelées par un groupe mixte.


Dans ce graphique, nous remarquons que la plupart des hommes se font cyber harceler par d’autres hommes, à 60%. Tandis qu’en majorité des cas, pour les femmes et pour les individus ne ce considérant pas comme homme ou femme, leur cyber harceleur était un groupe mixte. Les filles ou groupes de filles cyber harcèlent beaucoup plus d’autres filles. 36,6% de nos femmes enquêtées disent s’être fait harceler par une ou un groupe de filles alors que 12% des hommes se font cyber harceler par des filles.


Dimension 7 : harcèlement dans la vraie vie et répercussion du cyber harcèlement


Les victimes de cyber harcèlement ont tendance à ne communiquer avec personne. En effet, ils sont 65,1% à ne pas en avoir parlé à leur famille, 46,8% à ne pas en avoir parlé à leurs amis et 74,1% à ne pas en avoir parlé à des personnes extérieures proches. On remarque tout de même que les cyber harcelés ont plutôt tendance à en parler à leurs amis plutôt qu’à leur famille. Les individus cyber harcelés en parlent autour d’eux, mais peu d’entre eux ont vu leurs proches agir face à ce genre de situation.


Nous remarquons que la plupart des cyber harcelés se sont fait harceler dans la vraie vie. En effet, 36,42% des interrogés se sont fait harceler au collège, 15,65% à l’école primaire, 13,1% au lycée. Cependant, ils sont 22,36% des cyber harcelés à ne jamais avoir subi de harcèlement dans la vraie vie.


Le cyber harcèlement a des répercussions sur la personne qui le vit. En majeure partie, les individus ressentent, face à cette situation, de l’anxiété, ainsi que la perte de confiance en eux. Certains évoquent même la dépression, des comportements autodestructeurs, et d’autres conséquences allant jusqu’au suicide.


Sur ce graphique, on remarque que le cyber harcèlement à des répercussions, qu’importe le sexe de la personne. 19,7% des hommes n’ont ressenti aucune répercussion sur eux-mêmes lorsqu’ils ont vécu du cyber harcèlement, contre 5,7% pour les femmes. Mais, peu importe le sexe, la perte de confiance en soi et l’anxiété est la conséquence la plus fréquente lorsqu’une personne subit le cyber harcèlement.


Statistiques inférentielles


Hypothèse numéro 1


Notre première hypothèse était celle que le harcèlement à l’école et le cyber harcèlement avaient un lien, formulée grâce aux travaux de Hinduja et Patchin. Les cyber harceleurs adopteraient les mêmes comportements à l’école que sur internet, c’est-à-dire que les cyber harcelés se font tout autant harceler en ligne que dans la vraie vie. Pour vérifier cette hypothèse, nous avons mis en lien le moment du cyber harcèlement avec le moment du harcèlement dans la vraie vie puis la fréquence de cyber harcèlement avec le harcèlement dans la vraie vie.


Le graphique « lien entre cyber harcèlement et harcèlement » montre qu’une majorité de personnes ayant vécu un cyber harcèlement une seule fois dans leur vie n’ont jamais vécu de harcèlement, soit 67,9%. Tandis que les individus cyber harcelés plusieurs fois dans leur vie sont à 50,6% à s’être également fait harceler au collège, 48,4% à s’être fait harceler au lycée, 42,9% à s’être fait harceler ailleurs qu’en milieu scolaire ou professionnel. Parmi ceux qui se sont fait harceler sur internet très souvent dans leur vie, 60% d’entre eux se sont également fait harceler en étude supérieure. On remarque dans ce graphique que généralement, ceux qui ont vécu plusieurs fois un cyber harcèlement ont également vécu un harcèlement dans la vraie vie, notamment en milieu scolaire. Dans le second graphique qui met en lien les moments de cyber harcèlement et de harcèlement, on voit que les individus ayant vécu du harcèlement en ligne au moment où ils étaient au collège ont vécu du harcèlement au collège même, similaire aux individus l’ayant vécu pendant l’école primaire. En effet, 46,2% des individus cyber harcelés au collège se sont fait harceler au collège, et 32,7% des individus cyber harcelés durant leurs années d’école primaire se sont également fait harceler dans ce lieu. On en déduit alors que le harcèlement en ligne et le harcèlement dans la vraie vie se sont passés en même temps, à la même période. Néanmoins, on remarque que les individus se font particulièrement harceler au collège, 31,7% des cyber harcelés pendant le lycée se sont fait harceler au collège et 30,8% des cyber harcelés à l’école primaire se sont fait harceler au collège. Notre hypothèse est donc validée puisqu’il existe bien un lien entre le harcèlement en milieu scolaire et le harcèlement dans la vraie vie. Néanmoins, à partir des études supérieures, on remarque que le cyber harcèlement existe toujours, mais le harcèlement dans la vraie vie, beaucoup moins. En effet, les individus ayant vécu du cyber harcèlement durant leurs études supérieures ou durant leur vie professionnelle sont les plus nombreux à ne s’être jamais fait harceler dans la vraie vie.


Hypothèse numéro 2


Notre seconde hypothèse était que les jeunes, en l’absence de surveillance des activités faites en ligne, ont plus de risques de se faire cyber harceler, selon les travaux de Smahel et Wright en 2014. Pour vérifier cette hypothèse, nous avons lié la fréquence de cyber harcèlement et le niveau de surveillance de leurs parents par rapport à ce qu’ils faisaient sur internet.


Étant donné que la plupart des individus ayant répondu à notre questionnaire ont avoué que leurs parents ne les surveillent jamais, il est compliqué de savoir si la surveillance des parents sur internet a un lien avec le cyber harcèlement de leur(s) enfant(s). Le graphique croisant la fréquence de cyber harcèlement et la surveillance des parents sur internet ne nous permet pas de valider notre hypothèse puisque, qu’importe la fréquence de cyber harcèlement de l’individu, les individus n’ont pas de parents qui surveillent ce qu’ils faisaient sur internet. Notre graphique montre que peu importe si leurs parents les surveillent ou non, l’individu peut se faire harceler une fois, plusieurs fois ou très souvent. Notre graphique n’étant pas assez significatif, notre hypothèse n’est pas valide.



Hypothèse numéro 3


Notre troisième hypothèse était que le fait d’être isolé socialement, ou même rejeté est lié au cyber harcèlement, formulée grâce aux travaux de Kowalski. Cela voudrait dire que les individus peu intégrés socialement auraient plus tendance à être cyber harcelés que des individus intégrés. Pour connaître davantage le niveau d’intégration sociale des victimes, nous leur avons demandé combien d’amis avaient-ils, à différents moments de leur vie, mais également s’ils étaient soutenus durant ces périodes difficiles, ce qui montrera davantage si les individus étaient plutôt repliés sur eux-mêmes ou s’ils bénéficiaient de soutien de proches. Pour valider ou non cette hypothèse, nous avons croisé le nombre d’amis au collège, au lycée et en études supérieures en fonction de la fréquence de cyber harcèlement, puis la question de soutien en fonction de leur âge.

Nous remarquons, tout d’abord, que la plupart des individus interrogés n’ont aucun ami en études supérieures : 41% des individus cyber harcelés plusieurs fois dans leur vie, 66,7% des individus cyber harcelés très souvent et 55,6% des individus cyber harcelés une seule fois dans leur vie n’ont aucun ami lors de la période des études supérieures. Dans ces graphiques, nous remarquons que, peu importe quand, les individus s’étant faits très souvent cyber harcelés n’ont majoritairement aucun ami ou très peu. En effet, 27,8% des individus cyber harcelés très souvent ont un ami ou n’en ont aucun au collège, 41,2% n’en ont aucun lycée et 66,7% n’en ont aucun en étude supérieure.

Ces graphiques montrent que la majeure partie des interrogés cyber harcelés n’en parlent à personne. Peu importe l’âge des individus, ils sont très nombreux à ne pas en avoir parlé à d’autres personnes que leurs amis ou leur famille. Ils sont également très nombreux à ne pas en parler à leur famille. En général, ce sont vers leurs amis que vont se tourner les individus cyber harcelés. Les individus âgés entre 19 et 25 ans sont 46,5% à en parler à leurs amis et les plus de 25 ans sont 51,4%. En revanche, on voit que les plus jeunes ont tendance à ne pas en parler à leurs amis, ceux âgés entre 12 et 15 ans sont 55,6% à ne pas en parler à leurs amis et ceux entre 16 et 18 ans sont 47,2%. Nous pouvons alors valider notre hypothèse qui prouve que les individus exclus socialement étaient plus souvent cyber harcelés puisque la plupart des individus étant cyber harcelés très souvent ont peu ou pas d’amis, et la plupart des individus interrogés sont majoritaires à ne pas en parler autour d’eux.


À la fin de notre questionnaire, les individus ayant répondu ont pu le terminer avec un commentaire. Beaucoup d’entre eux nous ont écrits plus en détails comment ils ont vécu leur cyber harcèlement, comment cela s’est produit, les causes et les conséquences. Nous avons pu lire des témoignages plutôt bouleversants. Nous avons alors représenté un nuage de mots avec les mots qui revenaient le plus souvent dans cet espace commentaire.